St Michel d\'Euzet,
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« Le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie… » disait Pascal. Personnellement, je parlerais plutôt de fascination. Comment traduire l’espace, le temps, les énergies, la relativité et les nombreuses théories sur la matière et l’univers dans le langage artistique ? Pour cela, je suis allé puiser au fond de moi des sensations et j’ai cherché à traduire plastiquement ces concepts métaphysiques abstraits.
Mes travaux peuvent être rapprochés des courants artistiques du XX° s comme le constructivisme, support/surface, le minimalisme ou l’art cinétique. Ils sont une référence, mais je m’en éloigne car j’utilise ce langage pictural comme base symbolique afin de représenter les forces qui structurent l’univers. Mon intérêt pour les civilisations anciennes et les peuples premiers exerce aussi une grande influence sur mon travail, à la fois par la maîtrise technique de leurs créations et par les rapprochements symboliques de leurs différentes cosmogonies qui me permettent de discerner des archétypes partagés par tous les humains. Tous ces mythes sur la création ainsi que la science nous amènent à reconsidérer notre place au sein de l’univers et à replacer le sens du sacré au cœur de mon questionnement. A une époque où l’on assiste à une perte du sens de la vie par un matérialisme destructeur et où les religions peinent à dépasser leurs dogmes, je pense qu’il est essentiel de renouer avec une certaine mystique qui pourrait replacer les humains au centre des mystères de l’univers par une nouvelle spiritualité, trop souvent absente de la production artistique contemporaine mercantiliste.
Pour exprimer cela j’ai développé une technique à la fois personnelle et classique, celle du châssis/support et de la toile enduite et peinte, sorte de tableau/sculpture pouvant symboliser l’espace-temps et ses composants. Mes sculptures sont faites d’une structure que j’habille progressivement de plusieurs couches de toile enduite. A chaque épaisseur, mes couches d’apprêt sont poncées pour arriver à une texture lisse et très résistante sur laquelle je peux peindre. Cette technique me permet de réaliser des formes complexes et robustes. Certaines sculptures sont, de plus, animées d’un mouvement oscillatoire symbolisant la gravitation de la matière en mouvement perpétuel.
J’aime, en travaillant, penser aux maîtres anciens qui préparaient patiemment leurs œuvres en choisissant un support de qualité et en l’enduisant longuement de multiples couches d’apprêt. Ils créaient ainsi un espace pour y peindre leur vision : projection humaine et rassurante des espaces infinis de Pascal…
Frédéric Ramadier